un changement de nom, ou une révolution?
Depuis sa création, WATA Games s’est imposée comme l’acteur majeur du grading spécialisé dans les jeux vidéo — scellant des cartouches, des boîtes scellées, des éditions complètes (CIB), et des médias (DVD, Blu-Ray, CDs). Ce système a permis de structurer un marché disparate, en apportant une nomenclature commune (grades, population reports, holders sécurisés).
Mais à l’automne 2025, une annonce majeure change la donne: WATA ne disparaît pas exactement, mais intègre de façon plus étroite l’écosystème PSA (Premium Sports Authenticator), sous la bannière PSA Video Games.
Essentiellement, les soumissions reçues à partir du 15 octobre 2025 seront logées dans des boîtiers PSA et porteront des étiquettes PSA (plutôt que WATA).
Par ailleurs, les jeux recevant la note maximale (grade 10 A++) ou déjà classés 10 sous WATA recevront un nouveau label or spécial.
Du point de vue du collectionneur, ce virage soulève de nombreuses questions: continuité ou rupture? revalorisation ou remise en cause des anciennes gammes? opportunité ou risques?
Origines et positionnement de WATA: le contexte avant la fusion
WATA: naissance et montée en puissance
WATA Games a été fondée pour répondre à un besoin: le marché du retrogaming manquait d’un acteur spécialisé pour évaluer et certifier l’état des jeux vidéo, notamment pour les versions scellées, boîtes, cartouches, etc.
Elle s’est rapidement imposée, notamment via des partenariats avec des maisons de vente (ex. Heritage Auctions), contribuant à fixer des records de vente (Super Mario Bros scellé, Zelda, etc.).
WATA a aussi généré des "controverses": des critiques sur l’opacité, les conflits d’intérêts, les liens présumés avec des maisons d’enchères, ou la “pression du grading” dans le marché du retrogaming.
Ce que WATA a apporté
Une normalisation du vocabulaire: grades, suffixes A, +, ++, etc.
Des rapports de population (combien de copies pour chaque grade) offrant une transparence (du moins partielle) sur la rareté.
Des boîtiers sécurisés, résistants aux UV, garantissant la conservation.
Une valorisation majeure des jeux bien notés, transformant ce hobby parfois “niche” en marché spéculatif reconnu.
Mais aussi:
Un effet de “standard imposé”: beaucoup de collectionneurs considèrent qu’un jeu non centré, non certifié WATA, vaut significativement moins.
Des critiques sur la “grade inflation” (hausse des notes parfaites), sur la subjectivité encore inscrite dans l’évaluation, et sur l’opacité de certains procédés.
Ainsi, le marché était mûr pour une “institutionnalisation” plus poussée, ce que PSA apporte aujourd’hui.
Que change l’intégration dans l’univers PSA / “PSA Video Games”?
Ce que PSA conserve
Les processus de grading, les standards, l’échelle WATA restent inchangés au moment du changement.
Les comptes utilisateurs WATA continueront à exister, avec historique des soumissions.
L’esprit de collector / communauté que WATA a cultivé ne semble pas être totalement abandonné.
Ce que PSA apporte de nouveau
Changement | Impact anticipé |
---|---|
Boîtiers unifiés PSA | Cohérence visuelle avec les autres domaines (cartes, comics…); uniformité des collections |
Label or pour les 10 | Distinction plus prestigieuse pour les meilleures copies |
Photos post-grading incluses | Amélioration de la documentation pour le consignataire et le vendeur |
Changement d’adresse (soumissions) simplifié | Suppression de la mention “WATA” dans l’adresse; alignement avec le système PSA classique |
Évolution des tarifs | Certains prix de service changent avec la nouvelle structure |
Limitation temporaire pour certains formats exotiques | Certains jeux “hors format standard” (boîtes japonaises, éditions rares) ne seront plus acceptés immédiatement sous la nouvelle infrastructure. |

En bref: une rationalisation, avec pour ambition de donner au grading de jeux vidéo une stature institutionnelle comparable à celle du grading de cartes (le domaine historique de PSA).
Les conséquences sur la valeur et la perception des anciens grades
Un point crucial: que vaudront les anciennes certifications WATA, après la transition? Voici quelques scénarios plausibles:
Maintien équivalent: les grades WATA existants restent pertinents, reconnus comme équivalents aux nouveaux labels PSA Video Games.
Prime de “rareté historique”: certaines anciennes estampes WATA pourraient gagner en valeur auprès des collectionneurs “pionniers”.
Dilution de prestige: si PSA Video Games offre trop de “10 gold label”, cela pourrait relativiser la valeur des grades antérieurs.
À cet égard, la procédure de “re-grading / re-holder” (reconditionner une copie déjà notée sous les nouveaux boîtiers) est importante: PSA prévoit une réduction de 20 % sur les re-holder orders pour fêter le lancement.
Cela incite les collectionneurs à migrer leurs jeux dans le nouveau format, ce qui influera sur la demande pour les vieux boîtiers WATA.
Avantages, risques et défis pour les collectionneurs
Les atouts attendus
Légitimité accrue: PSA est une marque reconnue depuis des décennies dans le monde des cartes, comics, autographes… Cette réputation peut rejaillir favorablement sur le grading de jeux vidéo.
Synergies de marché: les collectionneurs de cartes, bandes dessinées ou média pourront plus facilement intégrer les jeux vidéo dans leurs portefeuilles, sous une étiquette commune.
Meilleure visibilité et confiance: la marque PSA apporte une estampille de confiance additionnelle auprès des acheteurs ou acheteurs novices.
Standardisation capitalisée: un système commun permet d’harmoniser les pratiques et d’éviter des disparités entre firmes de grading.
Potentiel de croissance: plus de ressources, possibilité d’élargir les formats acceptés, meilleures infrastructures.
Les risques et défis
Uniformisation excessive / perte de spécificité: la conversion vers un standard plus “grand public” pourrait gommer certaines subtilités propres au monde du retrogaming (formes exotiques, versions régionales, jeux rares non standardisés).
Conflits d’intérêt renforcés: l’association plus forte avec une entreprise dominante (PSA) pourrait exacerber des critiques déjà soulevées contre WATA, notamment sur le rôle du grading dans la spéculation.
Pression sur les “non certifiés”: un jeu non gradé, ou en ancien boîtier WATA, pourrait souffrir d’une décote accrue si le marché évolue trop vite vers le nouveau standard.
Risque de “grade dilution”: s’il y a une inflation de copies “10 gold label”, l’exclusivité et la rareté pourraient s’en trouver affaiblies.
Transition chaotique / incertitudes techniques: certains formats ne seront pas immédiatement pris en charge (formats hors gabarit), ce qui pourrait frustrer certains collectionneurs.
Réaction communautaire: certains collectionneurs, attachés à WATA, pourront percevoir cette fusion comme une perte d’identité ou une commercialisation trop poussée.
Analyse critique: entre hype, investissement et préservation
Le casse-tête de la spéculation
Depuis quelques années, le monde du retrogaming s’est rapproché du monde des objets d’art ou du marché des cartes à collectionner: on parle de “valeur d’investissement”, de “plus-value”, etc. WATA a facilité cela en “quantifiant” l’état des jeux par un grade. Mais cette quantification a un coût: elle peut engendrer une spéculation déconnectée de la valeur historique, ludique ou culturelle des jeux.
La fusion avec PSA renforce ce lien entre le jeu vidéo et le marché des collectibles “haut de gamme”. C’est une belle opportunité, mais aussi un point de bascule: vers une inflation sur les prix, une course aux meilleurs grades, ou un écrantage accru des collectionneurs modestes.
Le rôle de préservation et de documentation
Un aspect souvent négligé est celui de la préservation historique. L’encapsulation dans des boîtiers sécurisés est un plus, tant que le grading ne encourage pas le “malcrackage” (ouvrir ou restaurer des jeux pour obtenir une meilleure note). La rigueur des standards, la transparence des rapports de population (population reports), et la documentation photographique sont des éléments essentiels pour garantir que le grading ne soit pas qu’un label marketing.
Avec PSA derrière, on peut espérer que les investissements technologiques (numérisation, base de données, traçabilité) s’améliorent — ce qui serait un gain pour la communauté, si c’est bien fait.
Quel avenir pour les “non graded”?
Dans cette transition, une question se pose: que devient un jeu exceptionnel, mais non gradé (ou refusé)? Le marché pourrait fortement privilégier les jeux certifiés PSA Video Games, marginalisant les pièces “libres”. Cela pourrait pousser à une uniformisation excessive, ou à une “pression de grading” permanente pour chaque pièce.
Les collectionneurs devront être attentifs à ne pas se faire “obliger” à grader chaque jeu, sauf si le gain potentiel justifie l’investissement (frais de grading + transport + risque).
La transformation de WATA Games en PSA Video Games marque une étape majeure dans l’histoire du retrogaming « certifié ». Ce n’est pas seulement un changement de nom, mais une transition vers un marché plus institutionnalisé, avec des forces d’échelle, de visibilité et de confiance accrue. Pour les collectionneurs, c’est une opportunité d’accroître la légitimité et l’interopérabilité de leurs collections… mais aussi un moment de vigilance : ne pas perdre de vue les fondements (authenticité, transparence, respect de l’histoire du jeu).
Il est encore tôt pour juger la portée réelle de ce virage, mais la communauté devra rester exigeante et critique, afin qu’un “grade 10” ne devienne pas qu’un label marketing. Le jeu n’est pas fini — il entre simplement dans une nouvelle ère.
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